L’Union européenne s’est félicitée vendredi des efforts fournis par certains pays pour endiguer l’afflux de migrants à la frontière entre la Pologne et la Biélorussie, tandis que les tensions ne cessent de croître du côté biélorusse. Samedi, le corps d’un jeune Syrien a été retrouvé par la police polonaise.
Restrictions de vol, proposition de rapatriement : l’Union européenne s’est félicitée de “progrès”, vendredi 12 novembre, dans ses efforts visant à endiguer l’afflux de migrants à sa frontière avec la Biélorussie, mais les tensions sont montées d’un cran.
Soumis à la pression croissante des pays occidentaux qui l’accusent d’orchestrer cette crise, Minsk a mené des exercices militaires conjoints avec la Russie et prévenu qu’il riposterait “sévèrement” à toute attaque.
Cette crise migratoire en Europe orientale suscite l’inquiétude grandissante des pays occidentaux. Le président américain, Joe Biden, a dit avoir fait part de sa “grande préoccupation à la Russie (…) et à la Biélorussie”, quelques heures après une déclaration similaire de sa vice-présidente Kamala Harris, en visite à Paris, qui a dénoncé l’activité “très préoccupante” du président Alexandre Loukachenko.
L’UE accuse la Biélorussie d’avoir organisé l’afflux de milliers de migrants à sa frontière avec la Pologne, en réponse à des sanctions occidentales, et s’efforce depuis plusieurs jours d’enrayer ces mouvements en stoppant des vols à destination de Minsk.
Première victoire, la Turquie, carrefour aérien majeur entre Europe et Moyen-Orient, a annoncé vendredi que les Irakiens, Syriens et Yéménites ne seraient plus autorisés à embarquer pour la Biélorussie à partir de ses aéroports “jusqu’à nouvel ordre”.
Peu après, le gouvernement irakien a indiqué qu’il s’employait à enregistrer les migrants irakiens bloqués à la frontière entre la Biélorussie et la Pologne qui voulaient rentrer “volontairement”.
“Nous voyons des progrès sur tous les fronts”, s’est réjoui vendredi le vice-président de la Commission européenne, Margaritis Schinas.
La restriction sur les vols vers la Biélorussie montre que les initiatives européennes “connaissent déjà un certain succès”, a renchéri Berlin, tandis que la France a appelé la Russie à intervenir auprès de la Biélorussie pour mettre fin au flux de migrants.
Parachutistes russes
Sous pression, Alexandre Loukachenko peut pour l’instant compter sur le soutien de son principal allié, le président russe Vladimir Poutine.
Des troupes aéroportées russes et bélarusses ont mené vendredi des “exercices de combat” à proximité de la frontière entre la Biélorussie et la Pologne. Deux soldats sont d’ailleurs décédés accidentellement, leur parachute ne s’étant pas ouvert.
Ces manœuvres, ainsi que le déploiement de militaires dans la zone frontalière par Minsk et Varsovie, suscitent les craintes d’une escalade dans un contexte plus global de lutte d’influence entre Moscou et l’Occident en Europe orientale.
Bruxelles et Washington ont ainsi exprimé leur inquiétude vendredi au sujet de mouvements militaires russes plus au sud, près de la frontière russo-ukrainienne. Après une réunion du Conseil de Sécurité de l’ONU jeudi, plusieurs pays, dont les États-Unis, la France et le Royaume-Uni, ont accusé Minsk de vouloir “déstabiliser” ses voisins.
L’an dernier, l’UE et les États-Unis avaient infligé des sanctions à Minsk après la répression d’un mouvement de contestation déclenché par la réélection jugée frauduleuse d’Alexandre Loukachenko, au pouvoir depuis 1994. Bruxelles a indiqué que de nouvelles mesures punitives seraient annoncées la semaine prochaine.
Alexandre Loukachenko a menacé de riposter en stoppant le transit de gaz russe vers l’Europe sur son territoire, mais le Kremlin a assuré que ses livraisons se poursuivraient normalement.
Un jeune migrant syrien retrouvé mort
Sur le terrain, les migrants sont pris en étau entre les forces biélorusses qui, selon Varsovie, les contraignent à avancer en tirant parfois des coups de feu en l’air, et les gardes-frontières polonais qui les refoulent sans ménagement.
Samedi, la police polonaise a annoncé avoir découvert le corps d’un jeune Syrien près de la frontière. Ce décès porterait à 11 le nombre de victimes mortelles de la crise migratoire à cette frontière entre l’UE et le Bélarus, selon les estimations des médias.
Selon les gardes-frontières polonais, entre 3 000 et 4 000 personnes sont coincées du côté biélorusse et “l’ampleur du problème ne diminue pas”. Avec parmi eux des femmes et des enfants, ils occupent des camps de fortune par un froid glacial, n’ayant que des feux de bois pour se réchauffer.
Vendredi, le directeur européen de l’OMS Hans Kluge s’est dit “très inquiet” pour ces “milliers de personnes vulnérables qui sont bloquées dans un no man’s land (…), à la merci des intempéries, alors que l’hiver approche vite”.
Jeudi, une aide humanitaire d’urgence a pu être acheminée à certains migrants, selon le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR).
Le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki a accusé le régime d’Alexandre Loukachenko de “terrorisme d’État” et estimé que son pays était la cible d’une “guerre d’un genre nouveau”, avec des civils utilisés comme “munitions”.
La Pologne, pays membre de l’UE et de l’espace Schengen, a déployé 15 000 militaires et érigé une clôture surmontée de fil de fer barbelé.
Avec AFP