Le Prix Femina 2021 du roman français a été attribué, lundi, à l’écrivaine Clara Dupond-Monod, récompensant son œuvre “S’adapter”. Le prix étranger revient, lui, au romancier turc, Ahmet Altan.
Lauréate du prix Landerneau des lecteurs, l’éditrice et journaliste Clara Dupond-Monod remporte une nouvelle récompense en moins d’une semaine. Le Femina a ouvert, lundi 25 octobre, la saison des prix littéraires en choisissant l’écrivaine pour “S’adapter” (éditions Stock), tandis que le prix étranger est allé au Turc Ahmet Altan pour un roman écrit en prison.
Réuni au musée Carnavalet à Paris, le jury, exclusivement féminin, a choisi cette lauréate au huitième tour, avec six voix, contre cinq à Thomas B. Reverdy pour “Climax” (Flammarion).
Éditrice et journaliste de 48 ans, Clara Dupont-Monod avait remporté le prix Landerneau des lecteurs une semaine auparavant, pour cette fiction sur l’arrivée d’un enfant handicapé dans une fratrie.
Ce prix, “je voudrais le dédier à tous les êtres différents, qui sont quand même 12 millions en France, et à toutes leurs fratries, tous ceux qui s’en occupent”, a-t-elle commenté devant la presse. “Quand un jury dit : on va s’adapter à un inadapté, eh bien on se dit que c’est presque gagné”.
L’autrice, prévenue par son éditeur, a raconté avoir été surprise par la nouvelle. “Je n’ai pas compris tout de suite. C’est très émouvant : ça va au-delà du livre, ce que ce prix couronne, et c’est ça qui me touche”, a-t-elle expliqué.
Le prix Femina est le premier des grands prix littéraires d’automne, avant le Médicis mardi, le Grand Prix du roman de l’Académie française jeudi, et les prix Goncourt et Renaudot le 3 novembre.
Le prix Femina du roman étranger est allé à Ahmet Altan, pour “Madame Hayat” (Actes Sud), roman écrit en prison et pas encore paru dans sa langue d’origine. C’est au premier tour qu’il l’a emporté, avec huit voix.
Le jeune narrateur tombe amoureux de cette dame plus âgée que lui, dont il écrit qu'”elle n’était pas belle à proprement parler, mais elle avait quelque chose de plus attirant encore que la beauté, un pétillement de vitalité”.
Picasso, 140 ans
Sorti de prison en avril après sa condamnation pour participation au coup d’État manqué de 2016, qu’il nie fermement, l’écrivain et journaliste de 71 ans ne peut quitter son pays.
“Malheureusement je ne pourrai pas être avec vous aujourd’hui (…) voyager hors de Turquie m’étant interdit”, a-t-il déclaré dans une vidéo de remerciements au jury.
Dans une lettre lue à la presse par son éditeur français Timour Muhidine, l’auteur a dédié ce prix Femina “à toutes les femmes turques et kurdes injustement emprisonnées”.
Enfin le prix de l’essai a été décerné à Annie Cohen-Solal pour “Un étranger nommé Picasso” (Fayard), qui raconte comment le maître espagnol n’a jamais acquis la nationalité française.
Éliminé de la sélection des finalistes, cet ouvrage a été repêché et élu au quatrième tour avec six voix. L’historienne, interrogée par l’AFP, s’est dite ravie.
“Il se trouve que Picasso a 140 ans aujourd’hui ! C’est un homme qui ne s’est jamais plaint de ce qui lui est arrivé, alors que pendant des décennies il a vécu quelque chose que vivent tous les étrangers : il allait au commissariat tous les deux ans mettre ses empreintes. Il n’en a jamais dit un mot”, a rappelé Annie Cohen-Solal.
Quand il demande la nationalité en 1940, “c’est un obscur fonctionnaire de guichet, un petit bonhomme avec un pouvoir exorbitant, un véritable pétainiste, qui a enterré son dossier. J’ai découvert son nom, et j’ai pu comprendre comment même un grand génie n’est pas à l’abri de l’administration”, a-t-elle ajouté.
Avec AFP