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Élections en Allemagne : Die Linke, un peu de gauche radicale au gouvernement ?

Les sondages d’opinion, à quelques jours des élections allemandes du 26 septembre, montrent qu’il pourrait, pour la première fois de l’histoire en Allemagne, avoir une place au gouvernement pour Die Linke, le parti de gauche radicale. Et pourtant, il reste ultra-minoritaire. Explications.

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Rouge, rouge, vert. C’est un mélange des couleurs qui revient de plus en plus souvent dans les discussions politiques allemandes à trois jours des élections générales de dimanche 26 septembre. Il désigne l’éventuelle coalition gouvernementale entre les sociaux-démocrates du SPD, le parti de gauche radicale Die Linke, et les Verts.

C’est la première fois dans l’histoire de l’Allemagne d’après-guerre qu’une telle perspective semble crédible. Et c’est d’autant plus étonnant que Die Linke n’est même pas assuré d’obtenir les précieux 5 % des votes, minimum nécessaire pour être représenté au Bundestag (l’équivalent de l’Assemblée nationale).

Die Linke prêt au compromis

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“Il y a deux facteurs qui expliquent pourquoi une coalition entre ces trois formations est, cette fois-ci, prise au sérieux : d’abord, c’est le première fois que les deux autres partis – le SPD et les Verts – n’ont pas totalement exclu cette éventualité, et selon les sondages, un tel attelage pourrait mathématiquement avoir la majorité absolue au Bundestag”, résume Thorsten Holzhauser, politologue à la fondation Theodor-Heuss-Haus et spécialiste du parti Die Linke, contacté par France 24.

Étant donné les bons scores attendus du SPD d’Olaf Scholz et des Verts d’Annalena Baerbock, il suffirait que Die Linke obtienne 5 ou plus pour qu’une coalition rouge-rouge-vert soit possible.

D’ailleurs, les dirigeants de Die Linke sont tout à fait en faveur d’une participation au gouvernement. Le parti a publié une “sofortprogramm” (des mesures à appliquer immédiatement en cas d’accession au pouvoir) indiquant ainsi que les candidats de Die Linke étaient dans une dynamique constructive digne d’un parti de gouvernement et non pas seulement dans la critique. Janine Wissler, coprésidente de Die Linke, répète, en outre, à longueur d’interviews que les promesses de campagne du SPD ou des Verts seraient bien plus simples à appliquer avec eux qu’avec les libéraux du FDP.

Cet enthousiasme à l’idée de gouverner peut surprendre venant d’un parti composé, en partie, d’anciens communistes de l’ex-Allemagne de l’Est qui ont encore une dent contre le modèle démocratique occidental. Surtout qu’un courant radical, opposé à tout compromis avec les partis de l’establishment, domine le groupe Die Linke au Bundestag. 

Mais, pour Thorsten Holzhauser, c’est justement l’histoire de Die Linke qui permet de mieux comprendre leur appétit pour le pouvoir. “Ils sont issus du SED – c’est-à-dire le parti socialiste unifié d’Allemagne de l’Est – une formation habituée à exercer le pouvoir en ex-RDA et qui a cette ambition chevillée au corps”, rappelle le politologue allemand.

En outre, Die Linke a déjà “démontré sa capacité à faire des compromis pour entrer au gouvernement au niveau régional”, souligne Thorsten Holzhauser. En 1998, l’ancêtre de Die Linke, le PSD (Parti du socialisme démocratique) a participé à plusieurs coalitions dans des Länder de l’est comme le Mecklembourg-Poméranie-Occidentale ou à Berlin à partir de 2002. Die Linke a même fait une incursion à l’ouest en participant à un gouvernement à Brême en 2019.

Le SPD et les Verts un peu moins

Les blocages venaient plutôt du SPD et, dans une moindre mesure, des Verts. “Une partie du SPD est traditionnellement anti-communiste, et il existe une aile libérale qui ne veut rien avoir à faire avec la gauche dite extrême”, analyse Thorsten Holzhauser. En outre, les sociaux démocrates n’ont pas digéré la naissance de Die Linke puisque le parti est le résultat de la fusion, en 2007, entre les ex-communistes du PSD et des membres du SPD qui ont quitté le navire pour protester contre la direction du parti d’alors.

Avec les Verts, il n’y a pas ce passif qui complique les relations. Mais “ils ont une approche radicalement différente de la politique étrangère allemande”, rappelle le politologue de la fondation Theodor-Heuss-Haus. Die Linke est beaucoup plus protectionniste dans sa vision du monde et ne veut pas que l’Allemagne participe à des engagements militaires à l’étranger.

En fait, l’une des pierres angulaires historiques du programme de Die Linke est la volonté de faire sortir l’Allemagne de l’Otan et d’œuvrer pour son démantèlement à plus ou moins long terme. Cette opposition à l’alliance militaire nord-atlantique a souvent été présentée comme l’obstacle majeur pour une coalition gouvernementale entre le SPD et Die Linke à Berlin.

Mais preuve du chemin parcouru à la veille des élections générales du 26 septembre, les dirigeants de Die Linke ont laissé entendre qu’ils seraient moins dogmatiques sur la question de l’Otan. Et le SPD a déclaré que si ces héritiers des communistes de l’est reconnaissaient l’Alliance, tout était désormais possible.

“Actuellement, une majorité du SPD et des Verts trouve que leurs programmes sont globalement compatibles avec celui de Die Linke. Olaf Scholz, le candidat du SPD à la chancellerie, est peut-être l’un des moins enthousiastes”, résume Thorsten Holzhauser. Mais il se pliera à l’avis du parti si la formation d’une majorité gouvernementale en dépend, veut croire la Süddeutsche Zeitung, le grand quotidien de centre gauche allemand.

Objectif : obtenir plus de 5 %

Le dernier obstacle à cette coalition rouge-rouge-vert vient donc du risque pour Die Linke de ne pas franchir le seuil vital des 5 % lors de l’élection. Le parti part à l’assaut des électeurs allemands avec plusieurs handicaps, d’après Thorsten Holzhauser. “D’abord, c’est un mouvement qui apparaît comme divisé – entre son courant radical et ses membres plus pragmatiques – et les électeurs allemands ont du mal avec les formations qui ne projettent pas une image d’unité”, souligne-t-il. 

Ensuite, Die Linke – qui s’est doté d’une nouvelle direction en février 2021 – manque d’un leader naturel comme Olaf Scholz pour le SPD, ou Annalena Baerbock pour les Verts. Et leur personnalité la plus charismatique, la députée Sahra Wagenknecht, est ostracisée au sein même du parti car elle est considérée comme trop radicale. 

Dans un sondage publié en août dernier, elle arrivait pourtant en troisième position des personnalités politiques les plus populaires en Allemagne, à égalité avec Olaf Scholz, rappelle la Süddeutsche Zeitung. En d’autres termes, Die Linke aborde l’élection sans candidat crédible au poste de chancelier “alors qu’un nombre important d’électeurs se décide aussi en fonction de qui ils voudraient voir succéder à Angela Merkel”, conclut Thorsten Holzhauser.

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