Médecin de formation, Martine Wonner, ancienne élue du parti présidentiel, est autant adulée par les anti-vaccins sur les réseaux sociaux qu’elle est honnie par ses pairs à l’Assemblée nationale, où elle est accusée de propager des contre-vérités sur le Covid-19.
En quelques mois, la députée du Bas-Rhin, Martine Wonner, désavouée par le parti macroniste, dont elle occupait les rangs à l’Assemblée nationale, est devenue une figure de ralliement des anti-vaccins et des anti-passe sanitaire, qui défilent samedi 7 août dans toute la France.
L’élue de 57 ans est de toutes les manifestations. À l’estrade le 17 juillet à Paris, c’est elle qui prend le micro devant la foule des opposants au passe sanitaire. Alors que ces derniers lui demandent comment interpeller leurs élus, elle les invite à “faire le siège des parlementaires” et à “envahir leurs permanences”. Ces propos vont lui attirer les foudres des députés, déjà bien agacés par les dérapages du personnage sur le Covid-19. Le groupe Libertés et territoires (LT) qui l’avait accueillie dans ses rangs après son exclusion de LREM en mai, ne veut plus d’elle et le patron des élus de la majorité, Christophe Castaner, a saisi la justice.
🔴#DirectAN : NON au PASS SANITAIRE
Le @gouv et les parlementaires doivent écouter les Français
➡️ NON à la stigmatisation d’une partie de la population
➡️ NON à cette société du contrôle
➡️ POUR la protection des droits fondamentaux pic.twitter.com/DbhIXwEaPN— Martine WONNER (@MartineWonner) July 21, 2021
Chez les covidosceptiques et complotistes en revanche, la prise de parole de Martine Wonner lui vaut un franc succès. Dans la très hétéroclite galaxie des anti-vaccins, elle devient la caution “élue” de la mouvance, sa voix à l’Assemblée, où d’ailleurs elle ne porte pas toujours le masque.
Lors de l’examen du projet de loi qui étend le passe sanitaire et impose l’obligation vaccinale aux soignants, le 25 juillet, l’élue alsacienne rencontre l’hostilité franche de l’hémicycle à chacune de ses dénonciations d’une dérive “totalitaire” ou d’un régime “d’apartheid”. “Comment fonctionne un complotiste ? Vous avez quatre heures”, taclait le ministre Olivier Véran. “L’histoire se souviendra !”, lançait-elle. Bruno Millienne (MoDem) lui claqua d’un revers : “Elle ne se souviendra pas de toi”.
Succès sur les réseaux sociaux
Moins connue du grand public que le comédien Jean-Marie Bigard ou que le chanteur Francis Lalanne, Martine Wonner, psychiatre, est néanmoins très suivie sur les réseaux. Elle compte des dizaines de milliers d’abonnés sur Twitter et Facebook. Depuis plus d’un an, elle diffuse sans relâche des infox sur le masque et les vaccins au grand dam de ses collègues.
Fin juin, filmée dans un taxi, Martine Wonner affirme que des compagnies aériennes interdisent leurs vols aux vaccinés, information plusieurs fois démentie. La vidéo est partagée quelque 10 000 fois en trois jours.
Un profil “social”
Médecin de formation, Martine Wonner est l’une de ces députées issues de la société civile, élue en 2017 après avoir revêtu les couleurs du parti présidentiel. Elle est passée par le Samu social en 2013 et a occupé plusieurs postes de conseil et de direction dans l’hôpital public et le privé, ce qui lui vaut d’être repérée par Emmanuel Macron pour son expertise sur la psychiatrie et sur la grande précarité.
Se positionnant plus à gauche que la majorité présidentielle, au profil plus “social”, elle prend ses distances dès 2018, en s’abstenant de voter la loi asile-immigration, puis d’autres textes soutenus par la majorité comme la loi anticasseurs de février 2019, ou encore la ratification du Ceta – l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada.
De l’hydroxychloroquine à l’extrême droite
En 2020, la crise sanitaire passe par là et finit de fâcher la députée avec sa majorité. La bascule se fait en quelques mois. Très vite Martine Wonner prend le contrepied de la majorité des experts en défendant l’hydroxychloroquine dans le traitement du Covid-19. Avec son collectif Laissons les médecins prescrire, elle milite en faveur d’un protocole médical. Jugé dangereux, ce protocole sera rapidement dénoncé par l’Ordre des médecins. Seule députée LREM à avoir voté contre la stratégie de déconfinement de l’exécutif, elle est exclue du parti le 6 mai 2020.
Après son divorce du printemps 2020 avec le parti d’Emmanuel Macron, elle intègre brièvement un groupe écologiste à l’Assemblée. Mais ses tweets posent problèmes. Elle relaie des sites d’extrême droite et le co-président d’Écologie, démocratie, solidarité, Mathieu l’Orphelin, lui demande de les retirer, ce qu’elle refuse de faire préférant tourner les talons.
Aujourd’hui, la députée n’est plus affiliée à aucun parti. Elle a annoncé, fin juillet, qu’elle s’apprêtait à lancer son propre “mouvement”. Un “mouvement apolitique et citoyen” qui s’adressera “à tous ces citoyens français qui n’en peuvent plus”, a-t-elle précisé, ajoutant “qu’une des premières choses qu’il faudrait faire serait dissoudre les partis politiques”.
Avec AFP