L’entrepreneur Sun Dawu, critique régulier du pouvoir de Pékin, a été condamné mercredi à 18 ans de prison par un tribunal chinois. Il s’agit de l’une des sentences les plus lourdes prononcées ces dernières années par la justice à l’encontre d’un contestataire.
Après les dissidents, les hommes d’affaires chinois jugés trop critiques du pouvoir sont dans le viseur de Pékin. Le milliardaire chinois Sun Dawu, qui émet régulièrement des critiques contre les autorités, a été condamné à 18 ans de prison pour une série d’infractions et de malversations, a annoncé, mercredi 28 juillet, le tribunal populaire de Gaobeidian, ville de la province de Hebei, dans le nord du pays.
Le procès de ce médiatique patron autodidacte de 67 ans, dirigeant d’un groupe spécialisé dans l’agriculture, était jugé par ses défenseurs comme emblématique de la manière dont le régime communiste perçoit les puissants magnats du secteur privé.
Selon un communiqué du tribunal, Sun Dawu a été condamné à 18 ans de prison et à une amende de 3,11 millions de yuans (405 000 euros).
Cette lourde peine est justifiée par une longue liste de condamnations pour “exploitation minière illégale”, “occupation illégale de terres agricoles”, “entrave à la fonction publique”, “rassemblement d’une foule en vue d’attaquer des organes de l’État” ou encore “provocation aux troubles”. Cette dernière accusation, à l’intitulé vague, est souvent utilisée contre les opposants.
Connu pour son franc-parler
Le magnat de l’agroalimentaire, des membres de sa famille et des employés avaient été interpellés fin 2020 à la suite d’un conflit foncier avec une exploitation agricole étatique du Hebei. Sun Dawu avait fondé le groupe Dawu en 1984 comme une entreprise familiale d’élevage de poulets et de cochons. Il l’avait depuis transformée en un immense empire couvrant également la santé et le tourisme. C’est l’une des entreprises phares du secteur agricole dans le nord de la Chine. Elle a également ouvert des écoles et des hôpitaux.
La sentence contre Sun Dawu est l’une des plus lourdes prononcées ces dernières années par la justice chinoise à l’encontre d’un critique du pouvoir. Elle égale celle infligée l’an dernier à un autre richissime patron, Ren Zhiqiang, condamné pour corruption.
Surnommé “le Canon” pour ses diatribes contre le pouvoir, Ren Zhiqiang avait osé comparer le président Xi Jinping à un “clown” pour son rôle dans la lutte contre l’épidémie de Covid-19.
Connu pour son franc-parler, Sun Dawu avait lui aussi critiqué avec véhémence les autorités pour leur gestion de la pandémie. Il s’était déjà fait remarquer en 2019 lors d’une épidémie dévastatrice de peste porcine dans le pays, à l’origine de l’abattage de millions de têtes. Il avait publié en ligne des photos de cochons morts pour alerter les médias et accusé les responsables locaux de laxisme face à la maladie.
Critique régulier des politiques rurales, Sun Dawu demande que les agriculteurs soient davantage libres de s’organiser pour protéger leurs intérêts économiques.
Signe de la sensibilité de son procès, une forte présence policière était visible aux abords du tribunal, selon une vidéo partagée par son avocat. Le procès “a violé les normes judiciaires et les droits de l’accusé n’ont pas été garantis”, a estimé ce dernier dans un communiqué.
Sun Dawu avait eu ses premiers démêlés avec la justice en 2003. Il avait alors été condamné à quatre ans de prison avec sursis pour “collecte illégale de fonds” après avoir été reconnu coupable d’avoir récolté 13 millions de yuans (1,7 million d’euros au taux actuel) pour son entreprise, sans autorisation de la banque centrale.
Avec AFP