Des tweets dans plusieurs langues étrangères ont fait état de policiers français qui se seraient joints aux protestations contre les mesures sanitaires du gouvernement en France. Si la vidéo utilisée pour appuyer leurs propos date bien du 17 juillet dernier, les gendarmes à l’avant du cortège ne font qu’encadrer la manifestation.
Une vidéo de 22 secondes où l’on voit un cordon de force de l’ordre à l’avant d’un cortège de manifestants, dont des Gilets jaunes, circule depuis quelques jours sur Twitter. Selon les nombreux tweets qui relayent la vidéo, dans une quinzaine de langues différentes, on y verrait des policiers français se joindre aux manifestations anti-passe sanitaire du 17 juillet.
Ce tweet en italien a par exemple récolté près de 450 mentions “j’aime”, cet autre en mandarin plus de 200. Sur Twitter comme sur Facebook, on retrouve également une dizaine d’occurrences en anglais, coréen, suédois ou encore japonais.
La vidéo relayée par la plupart de ces internautes a été postée le soir du 17 juillet par le compte “Qlobal Army”, nom qui fait allusion au mouvement complotiste pro-Trump Qanon. La publication retweetée plus de 1 300 fois a suscité de nombreuses réactions telles que “vive la France” ou “Pourquoi on ne fait pas pareil dans notre pays ?”
Un élément est cependant correct dans ces tweets : la scène se déroule bien le 17 juillet, lors d’une manifestation anti-passe sanitaire, plus précisément à Paris.
En effet, on retrouve le mur en pierre où les arbres dépassent à gauche de la vidéo et les bâtiments à droite sur une portion de la rue Geoffroy-Saint-Hilaire, visible ici sur Google Street View. Il s’agit d’une rue en fin de parcours de l’une des deux manifestations parisiennes contre le passe sanitaire, celle du mouvement des Gilets jaunes parti de Plaisance (14e arrondissement de Paris) pour Jussieu (5e arrondissement de Paris).
Ces images viennent en réalité d’un direct d’une manifestation réalisé par “Civicio”, un média indépendant qui couvre régulièrement les manifestations de Gilets jaunes. À partir de 3 heures 09 minutes 40 secondes, on retrouve effectivement la vidéo de 22 secondes où le cortège scande “liberté, liberté” avec un cadrage légèrement plus large.
“Un encadrement classique de manifestation”
Si cette vidéo montre bien une scène de manifestation datée du 17 juillet, les gendarmes – et non les policiers comme indique l’écriteau sur leur uniforme – ne se joignent pas aux manifestants.
Dans la vidéo initiale, on peut déjà observer que ces derniers ne scandent aucun slogan et sont les seuls à porter des masques chirurgicaux. Ils arborent, en outre, un équipement d’encadrement de manifestation, tels que des boucliers anti-émeutes, des haut-parleurs et des casques, qui sont encore plus visibles avec le cadrage de la vidéo live originale.
Ces mêmes gendarmes contiennent fermement le cortège à d’autres moments de la vidéo live intégrale, notamment à partir de 31:15:05 à l’arrivée à Jussieu ou encore un peu plus tôt à 02:32:40 devant l’église Notre-Dame-de-la-Gare.
Une telle alliance entre manifestants et gendarmes est d’ailleurs techniquement impossible, comme le rappelle Frédéric Le Louette, président de l’association de gendarme GENDXXI, contacté par la rédaction des Observateurs de France 24 :
Les gendarmes sont des militaires, ils n’ont pas le droit de manifester, en civil comme dans leur uniforme. Sur cette vidéo, il s’agit juste d’un encadrement classique d’une manifestation et non d’un soutien. Les gendarmes sont dans leur rôle.
La rédaction des Observateurs de France 24 a également contacté l’auteur de la vidéo, Yacine Blotas de Civicio, qui ne laisse aucun doute sur une non alliance entre gendarmes et manifestants, faisant état même de quelques tensions :
Les gendarmes ont fait correctement leur travail, laissant des points de sorties aux manifestants tout en leur permettant d’avancer à un rythme correct. Mais en fin de mobilisation, le cortège s’est mis à accélérer et un gendarme a gazé la tête de cortège malgré des ordres directs allant dans le sens inverse par son major.
Les manifestants mettaient légèrement la pression, mais ne montraient aucune attitude agressive, le gazage n’était donc pas justifié et a, au contraire, déclenché par la suite une certaine tension.
Ce n’est pas la première vidéo censée représenter des forces de l’ordre françaises solidaires avec les manifestants anti-mesures sanitaires circulant à l’étranger.
Une autre vidéo où l’on voit des policiers casques et matraques à terre applaudir un cortège de soignants en juin 2020 à Nîmes avait également été détournée après les manifestations du 17 juillet 2021 et fait l’objet d’une vérification par Indian Today.