Les Taliban se sont emparés, dimanche, du district-clé de Panjwai, dans leur ancien bastion de la province méridionale de Kandahar, après des combats nocturnes contre les forces afghanes. Il s’agit d’une nouvelle prise pour les insurgés à l’approche du retrait total des troupes américaines.
Les Taliban continuent de regagner du terrain en Afghanistan. Ils se sont emparés, dimanche 4 juillet, du district-clé de Panjwai, dans le sud du pays, après des combats nocturnes. Une prise de contrôle qui a poussé des dizaines de familles à fuir la zone.
Depuis que Washington a commencé, le 1er mai, le rapatriement de ses soldats d’Afghanistan, à l’issue de 20 ans de guerre, les Taliban ont intensifié leurs offensives contre les forces afghanes pour prendre le contrôle de nombreuses zones rurales à travers le pays.
Située à une quinzaine de kilomètres de la ville de Kandahar – la capitale provinciale –, Panjwai fut longtemps un foyer taliban et le théâtre pendant des années d’importants combats entre rebelles et troupes de l’Otan. Le chef des Taliban, Hibatullah Akhundzada, est par ailleurs originaire de ce district-clé.
La prise de Panjwai intervient deux jours après le départ des troupes américaines et de l’Otan de Bagram, leur base la plus importante en Afghanistan, située à 50 km au nord de Kaboul et centre névralgique des opérations de la coalition contre les insurgés islamistes ces 20 dernières années.
Selon le gouverneur du district de Panjwai, Hasti Mohammad, Taliban et forces afghanes se sont affrontés au cours de la nuit de samedi à dimanche, avant que ces dernières ne quittent la zone. “Les Taliban se sont emparés du QG de la police dans le district et du bâtiment du gouvernorat”, a-t-il expliqué à l’AFP.
Le président du conseil provincial de Kandahar, Jan Khakriwal, a confirmé la chute de Panjwai, tout en accusant les forces afghanes “en nombre suffisant” dans la zone de “s’être retirées intentionnellement”.
Kandahar est le berceau du mouvement des Taliban, qui s’est emparé du pouvoir en Afghanistan en 1996, mettant en place un régime islamique ultrarigoriste avant d’être renversé par une coalition menée par les États-Unis et entrée en Afghanistan en 2001, après les attentats du 11-Septembre.
“Il n’y aura pas de paix”
Des dizaines de familles fuyaient, dimanche, leurs domiciles du district de Panjwai après sa capture par les Taliban. “Nous avons dû fuir notre village. Les Taliban ont ouvert le feu sur notre voiture, alors que je fuyais avec ma famille. Au moins cinq balles ont touché la voiture”, mais personne n’a été blessé, a raconté à l’AFP Giran, un habitant de Panjwai ayant trouvé refuge à Kandahar.
“Ils sont en hauteur et tirent sur tous les véhicules en mouvement”, a-t-il affirmé. “Les gens veulent la paix, mais il n’y aura pas de paix. Les Taliban veulent le pouvoir, ils ne veulent pas la paix.”
Panjwai est le cinquième district de la province de Kandahar à tomber aux mains des Taliban ces dernières semaines. Dimanche après-midi, le secrétaire du gouverneur de Kandahar a été tué par l’explosion d’une bombe placée sur sa voiture, devant le gouvernorat, a annoncé le ministère de l’Intérieur.
Les combats font rage ces dernières semaines dans plusieurs provinces afghanes et les Taliban affirment contrôler une centaine de districts sur les près de 400 que compte le pays.
Les autorités afghanes contestent ce nombre, mais admettent que les forces gouvernementales se sont retirées de certains districts, et il est difficile de vérifier la situation sur le terrain de manière indépendante.
“Le retrait des forces américaines a enhardi les Taliban”
Le retrait des forces étrangères de Bagram et à court terme de l’Afghanistan fait craindre aux observateurs que l’armée afghane ne peine face aux Taliban sans le soutien aérien fourni jusqu’ici par les forces américaines. Certains experts estiment que cette absence de soutien aérien américain aux forces afghanes est l’une des principales raisons des récentes conquêtes des Taliban.
“Le retrait des forces américaines a enhardi les Taliban, comme le montre l’escalade de la violence”, explique l’analyste afghan Ramish Salimi. “Cette année va être difficile pour l’Afghanistan (…), surtout que les pourparlers de Doha n’ont produit aucune avancée positive.”
Des négociations de paix entre les Taliban et le gouvernement de Kaboul, entamées en septembre 2020 dans la capitale du Qatar, sont au point mort depuis des mois.
Mais le ministre afghan de l’Intérieur, Abdul Satar Mirzakwal, a assuré à la télévision privée Tolo News que l’Afghanistan disposait désormais d’une “aviation puissante”. “Les villes sont une ligne rouge” et “nous les défendrons de toutes nos forces” contre les Taliban, a-t-il affirmé.
La Maison-Blanche a annoncé vendredi que le retrait total des troupes américaines serait achevé d’ici fin août, mettant fin à la plus longue guerre de l’histoire des États-Unis.
Avec AFP