Le ministre britannique de la Santé, Matt Hancock, a annoncé samedi sa démission après s’être vu reprocher le non respect des restrictions sanitaires. Comme lui, plusieurs personnalités politiques ont dû quitter leurs fonctions à la suite de scandales liés à la pandémie de Covid-19. Tour d’horizon.
Le ministre britannique de la Santé, Matt Hancock, a annoncé sa démission samedi 26 juin, reconnaissant avoir “enfreint les consignes” sanitaires destinées à enrayer la pandémie de Covid-19. Pourtant soutenu par Boris Johnson, il a cédé à la pression populaire après la publication, par le tabloïd The Sun, de la vidéo d’un langoureux baiser avec une assistante, dans son bureau, au mépris des règles de distanciation sociale qu’il avait lui-même mises en place.
Si cette affaire rappelle étrangement celle de Neil Ferguson – l’éminent conseiller scientifique du gouvernement avait été forcé à la démission en mai 2020 pour avoir enfreint les règles du confinement avec sa maitresse –, ce type de scandales est loin d’être une spécificité britannique. Depuis le début de la pandémie, plusieurs responsables politiques ont été forcés de quitter leur poste pour des motifs liés au Covid-19 – violation des règles, corruption, favoritisme ou négligence. Tour d’horizon à travers quelques cas emblématiques.
- Allemagne : lobbying des masques
C’est un scandale dont se serait bien passé le parti d’Angela Merkel. En février, à six mois des élections fédérales – qui signeront la fin de règne de la chancelière –, deux membres de la majorité parlementaire ont été accusés d’avoir touché plusieurs centaines de milliers d’euros de la part de fabriquant de masques, en échange de lobbying auprès des ministères en charge des achats. Selon les éléments de l’enquête relayés par la presse allemande, Georg Nüßlein, vice-président du groupe parlementaire CDU/CSU et spécialiste des questions de santé, aurait touché 660 000 euros pour l’aide apportée à une entreprise de la ville d’Offenbach (Hesse), tandis que Nikolas Löbel, l’un des plus jeunes députés du parti conservateur, aurait empoché 250 000 euros de la part d’un fabriquant chinois. Tous deux ont été immédiatement contraints de quitter le parti et leurs fonctions de député. Une enquête est en cours.
- Slovaquie : accord secret pour obtenir du Spoutnik V
Afin de lutter contre une pandémie qui frappe durement son pays, le Premier ministre Igor Matovic annonce le 1er mars dernier avoir commandé deux millions de doses de Spoutnik V. Problème ? Cet accord conclu dans le plus grand des secrets n’a fait l’objet d’aucune consultation, alors que le vaccin russe n’a même pas encore été homologué en Europe. L’annonce suscite un tollé en Slovaquie. Déjà critiqué pour sa gestion de la crise sanitaire, Igor Matovic finit par démissionner le 28 mars. De son côté, l’agence du médicament slovaque SUKL bloque l’utilisation des 200 000 doses déjà reçues, pointant l’insuffisance de données médicales. La Slovaquie reste à ce jour l’unique pays européen où un scandale lié à la pandémie a entraîné la chute d’un chef de gouvernement.
- Malawi : détournement de fonds
En avril 2021, le président du Malawi Lazarus Chakwera prend la parole pour dénoncer un scandale de fraude. Un audit diligenté par le gouvernement a révélé des irrégularités dans l’utilisation des 6,2 milliards de kechwa (environ 6,7 millions d’euros) consacrés à la lutte contre le Covid-19. Quatorze personnes sont arrêtées dont le ministre du Travail, Ken Kandodo, accusé d’avoir utilisé des fonds Covid pour financer un voyage à l’étranger. Bien que remboursés depuis, les 640 euros utilisés par le ministre lui valent un limogeage immédiat ainsi que des poursuites judiciaires. “Il n’y a pas de vaches sacrées” déclare alors le président, qui a érigé la lutte contre la corruption en priorité. “Si le doigt de la preuve te désigne… tu vas en prison”.
- Jordanie : négligence sur la gestion de l’oxygène
Mi-mars 2021, un scandale sanitaire tourne à l’émeute près de la capitale, Amman. La police est déployée pour protéger l’hôpital de la ville de Salt tandis que plusieurs centaines de personnes manifestent à la suite de la mort de sept patients. Atteints du coronavirus, ces derniers sont décédés à cause d’une pénurie d’oxygène, dans cet institut public inauguré en août. Le Premier ministre Bisher al Khaswaneh dénonce alors “une erreur grossière, injustifiable et inacceptable”, limoge le ministre de la Santé Nathir Obeidat qui reconnaît une “responsabilité morale”, et diligente une enquête judiciaire. Cette affaire intervient dans un contexte d’hostilité grandissante de la population à l’égard de restrictions sanitaires.
- Pérou : scandale de passe-droit à la vaccination
Des dizaines de ministres et hauts fonctionnaires vaccinés en secret avant même le début de la campagne vaccinale… Révélée en février dernier par la presse, cette affaire fait l’effet d’une bombe au Pérou, qui comptait déjà plus de 43 000 décès et dont les hôpitaux étaient débordés par l’afflux de malades. Le groupe pharmaceutique chinois Sinopharm, qui menait l’essai clinique de son vaccin dans le pays, avait livré 2 000 doses supplémentaires dans le cadre de l’étude. Une partie de celles-ci aurait été utilisée par les dirigeants qui en ont également fait bénéficier leurs proches. L’affaire a provoqué des démissions en cascade – celle de la ministre de la Santé, Pilar Mazzetti, de la ministre des Affaires étrangères, Elizabeth Astete – et poussé le président à ouvrir une enquête. Un scandale similaire a éclaté en Argentine où le ministre de la Santé a dû quitter son poste après avoir été accusé d’organiser des “vaccinations VIP”.
- Nouvelle-Zélande : vacances à la mer et vélo en montagne
Même en Nouvelle Zélande, pourtant réputée pour sa gestion rigoureuse de la crise, les dirigeants ne sont pas immunisés contre les scandales. En avril 2020, alors qu’un confinement strict est imposé à l’ensemble du pays, le ministre de la Santé David Clark reconnaît avoir effectué un trajet de 20 km pour se rendre à la mer en famille, le tout premier week-end de confinement. L’homme politique, qui s’était déjà illustré en allant faire du vélo dans la montagne au mépris des règles sanitaires qu’il avait lui-même édictées, fait alors acte de contrition. “J’ai été un idiot, les gens m’en voudront et c’est bien normal”, déclare-t-il dans un communiqué. Il présente sa démission à la Première ministre Jacinda Ardern qui, dans un premier temps, le rétrograde avant d’officialiser son départ le 2 juillet.