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Quand le ministre de l’Environnement brésilien faisait feu de tout bois

Devenu la bête noire des écologistes, le sulfureux ministre de l’environnement brésilien, Ricardo Salles, a démissionné mercredi sous la pression des critiques et de la justice. L’ex-membre du gouvernement est soupçonné, entre autres scandales, d’être impliqué dans un vaste réseau criminel de contrebande de bois.

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“Enfin, il était temps que ce scandale prenne fin, commente Cécile Leuba, chargée de campagne des forêts à Greenpeace France dans un entretien à France 24, au lendemain de l’annonce de la démission de Ricardo Salles, ministre brésilien de l’Environnement. Avec tous ses scandales, il est impensable que ce ministre ait pu rester aussi longtemps à son poste.”

Même délivrance au sein de Greenpeace-Brésil. “Le départ de Ricardo Salles était tardif mais nécessaire. Le Brésil ne pouvait plus avoir un ministre de l’Environnement qui – intentionnellement et délibérément – agissait contre l’environnement lui-même et causait de graves dommages au pays.”

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Rares sont en effet les ministres en charge de l’environnement capables d’œuvrer à ce point à l’encontre des intérêts écologiques. Jusqu’au mercredi 23 juin, Ricardo Salles, 46 ans, appartenant à l’aile dure du gouvernement Bolsonaro, pouvait s’enorgueillir d’appartenir à ce club si singulier qui défend avec ardeur les activités économiques en Amazonie au détriment de la préservation de la forêt. Conséquence : des records en matière de déforestation et une solide réputation de “ministre anti-environnement” auprès des écologistes.

Mais ce tour de force a brutalement pris fin, mercredi, sous la pression constante des ONG environnementales et de la justice brésilienne. “J’ai présenté ma démission au président (Bolsonaro) et il l’a acceptée”, a déclaré l’intéressé lors d’une conférence de presse.


Un “important réseau criminel transnational”

Pointé du doigt au Brésil et à l’étranger, c’est finalement une affaire d’exportations illégales de bois d’Amazonie qui a précipité sa chute. La perquisition de ses bureaux ministériels le 19 mai, à la demande du juge de la Cour suprême Alexandre de Moraes – qui avait aussi ordonné la levée de son secret bancaire –, ont rendu l’exercice de ses fonctions périlleux. La police fédérale enquête, en effet, sur un “important réseau criminel transnational de facilitation de contrebande de bois”, dans lequel seraient impliqués “des responsables comme le ministre Ricardo Salles, d’autres fonctionnaires et des entreprises”, avait expliqué le juge Moraes dans son arrêté.

L’homme, pourtant qualifié d’”exceptionnel” par Jair Bolsonaro au lendemain des perquisitions de ses bureaux, n’en est pas à sa première affaire. En avril, Ricardo Salles avait fait scandale en affirmant lors d’une réunion ministérielle, pendant laquelle il ignorait être enregistré, qu’il souhaitait profiter du fait que les médias étaient concentrés sur la pandémie de Covid-19 pour assouplir les normes environnementales.

Sous son égide, la déforestation a atteint un niveau record en mai, avec une progression de 41 % par rapport à ce même mois de l’année en 2020. Une hausse due entre autres, selon ses détracteurs, au fait qu’il a privé de moyens humains et financiers les organes publics de protection de l’environnement – comme l’Ibama ou l’ICMBio. Cette hausse constante met sérieusement en doute l’engagement devant la communauté internationale du président Bolsonaro d'”éliminer la déforestation illégale au Brésil d’ici à 2030″, soit dix ans plus tôt qu’initialement prévu, a déploré dans un communiqué le collectif d’ONG Observatoire du Climat.

Un ministre “anti-environnement” peut en cacher un autre

De son côté, Ricardo Salles a justifié mercredi sa politique en expliquant avoir ménagé un équilibre entre la nécessité de protéger l’environnement tout en “respectant l’agronégoce et les entrepreneurs de tous les secteurs, comme l’exploitation minière ou l’immobilier”.

Sa sortie du gouvernement n’est pas un soulagement pour autant pour les militants écologistes. L’ex-ministre a annoncé qu’il serait remplacé par Joaquim Alvaro Pereira Leite, qui travaillait déjà au ministère, en tant que secrétaire à l’Amazonie et aux Services environnementaux. Ce dernier était auparavant conseiller de la Société rurale brésilienne, une organisation qui représente les intérêts de l’agronégoce dans le pays. “Ce nouveau ministre devrait lui aussi s’inscrire dans la droite ligne de Bolsonaro qui va poursuivre sa politique destructrice”, abonde la militante écologiste.

Dans le même temps, une commission parlementaire approuvait justement “sans débat et en toute hâte” un projet de loi très controversé qui modifie les règles en vigueur de délimitation des terres indigènes. Mardi, des heurts entre policiers et autochtones qui manifestaient devant le Parlement ont fait plusieurs blessés. Le texte de loi doit encore être voté en séance plénière avant de passer au Sénat pour être adopté.

La déforestation a atteint un niveau record en mai, avec une progression de 41 % par rapport à ce même mois de l’année en 2020, alors que la saison sèche est tout juste en train de commencer. “On risque cette année encore d’assister à des incendies volontaires de grande ampleur”, s’inquiète Cécile Leuba. Une lueur d’espoir au milieu du sombre tableau : depuis la pandémie, “la côte de popularité du président est en baisse, conclut la responsable de Greenpeace. Peut-être qu’à la prochaine élection présidentielle, les Brésiliens désigneront un nouveau chef d’État qui mettra fin au désastre.”  

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