Le candidat de gauche à la présidentielle au Pérou, Pedro Castillo, en tête avec 50,12 % des voix à l’issue du dépouillement, a rejeté mardi les appels à annuler le scrutin. L’autorité électorale poursuit l’examen des recours déposés par l’opposition.
Après neuf jours d’attente, le dépouillement des scrutins de la présidentielle au Pérou est terminé, mardi 15 juin. Le candidat de gauche, Pedro Castillo, arrive en tête de l’élection avec 50,12 % des voix contre 49,87 % pour Keiko Fujimori, soit environ 45 000 voix d’avance pour l’instituteur et syndicaliste de 51 ans, selon le dernier décompte officiel portant sur 100 % des bulletins.
Au lieu de célébrer sa victoire, Pedro Castillo a rejeté les appels à annuler le scrutin pour “fraude” lancés par des soutiens de son adversaire de droite Keiko Fujimori. “Ils ne cessent de réclamer l’annulation de l’élection”, a déclaré M. Castillo devant la presse étrangère au siège de son parti à Lima, dans une allusion à des soutiens de Mme Fujimori qui ont appelé ces derniers jours à annuler le second tour du 6 juin.
“Nous attendons patiemment le résultat”, a ajouté le candidat de la gauche radicale, tandis que l’autorité électorale poursuit l’examen des recours, déposés principalement par la fille de l’ex-président Alberto Fujimori (1990-2000).
Le taux de participation au scrutin, qualifié de “positif” et sans “graves irrégularités” par la mission d’observation électorale de l’Organisation des États américains (OEA), a atteint 74,5 % selon les autorités électorales dans ce pays où le vote est obligatoire.
Des doutes émis sur la transparence du deuxième tour de la présidentielle
Mais Mme Fujimori, 46 ans, qui est dans le collimateur de la justice pour une affaire de corruption, dénonce des “fraudes” et a demandé l’invalidation de plusieurs dizaines de milliers de bulletins.
Mardi, elle s’est dite confiante de remporter l’élection, car “le plus important reste à faire”, à savoir évaluer ses recours. “Nous avons confiance dans les organes électoraux et dans la volonté du peuple. Nous savons que lorsqu’ils analyseront ces irrégularités, ils nous donneront raison”, a affirmé la candidate de droite.
Lundi, un député et amiral en retraite, Jorge Montoya, a appelé à l’annulation du scrutin et à la tenue de “nouvelles élections avec des observateurs internationaux”, estimant que le système électoral péruvien “n’offre plus de confiance”. M. Montoya fait partie des 64 généraux et amiraux à la retraite qui, en accord avec Keiko Fujimori, ont mis en doute la transparence du deuxième tour de la présidentielle.
Le ministère de la Défense a affirmé, dans un communiqué, que ce groupe d’officiers retraités “ne représente pas les forces armées”.
L’ex-parlementaire de droite, Victor Andrés Garcia Belaunde, a mis en garde dimanche à la télévision sur l’incertitude qui entoure le scrutin, ajoutant que si le processus de décompte devait se poursuivre jusqu’au 28 juillet, date d’expiration du mandat du président par intérim Francisco Sagasti, le chef du nouveau Parlement pourrait assumer la présidence et convoquer de nouvelles élections.
“Je pense que nous ne devons pas nous précipiter et encore moins utiliser des mots déplacés comme “fraude” et attendre les résultats calmement”, a exhorté, de son côté, M. Sagasti.
“La démocratie a des règles et des délais que nous devons tous respecter”, a toutefois mis en garde mardi à la radio RPP le cardinal Pedro Barreto à propos des appels à l’annulation des élections. L’Église catholique “est disponible” pour une médiation, une fois les résultats officiels annoncés, a-t-il ajouté.
Des manifestations quotidiennes des deux camps
La Haute-Commissaire des Nations unies aux droits humains, Michelle Bachelet, avait appelé dès lundi au “calme pour éviter de nouvelles fractures sociales” dans le pays de 33 millions d’habitants.
Aucune date n’a encore été donnée pour l’annonce des résultats définitifs et l’autorité électorale est sous la pression des partisans des deux candidats qui manifestent quotidiennement devant ses locaux à Lima.
Des dizaines de partisans de la candidate de droite se réunissent également chaque jour devant le domicile des présidents de l’Office national électoral (ONPE) en charge de l’organisation du scrutin et du Jury national électoral (JNE) chargé d’examiner les litiges et recours.
“Un tel appel à de nouvelles élections montre qu’on veut provoquer de la violence”, a regretté devant la presse étrangère la candidate à la vice-présidence de M. Castillo, Dina Boluarte.
“La position prise par un groupe de droite est séditieuse, mais le pays est calme”, a estimé auprès de l’AFP l’analyste Hugo Otero, ancien conseiller de l’ancien président social-démocrate Alan Garcia.
Avec AFP