Pour clore en beauté son premier voyage international, le président américain s’entretiendra avec Vladimir Poutine, mercredi à Genève. Une rencontre qui s’annonce tendue si l’on en croit les sorties musclées de Joe Biden à l’encontre de son homologue russe.
Alors que l’on prêtait à son prédécesseur une proximité, voire une connivence, avec le dirigeant russe, l’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche a marqué un net refroidissement des relations bilatérales. Très critique des prises de position de Donald Trump vis-à-vis de Moscou, le président américain a imposé une série de sanctions contre la Russie, l’accusant notamment d’avoir orchestré cyberattaques et actes d’espionnage. Le président des États-Unis a aussi multiplié les déclarations mordantes à l’égard de son homologue russe, donnant lieu à des échanges haut en couleur.
“Faire payer à la Russie”
Le 5 février, Joe Biden prononce son premier discours majeur de politique étrangère. Il y exprime sa volonté d’un net changement de ton vis-à-vis de la Russie : “J’ai clairement dit au président Poutine, d’une façon très différente de mon prédécesseur (Donald Trump, ndlr), que le temps où les États-Unis se soumettaient aux actes agressifs de la Russie (…) était révolu”, avertit-il.
Dans ce discours, il évoque l’interférence russe dans les élections américaines, les cyberattaques ou encore “l’empoisonnement de citoyens”, allusion à l’opposant politique Alexeï Navalny.
“Nous n’hésiterons pas à faire payer à la Russie un coût plus élevé et à défendre nos intérêts”. Le lendemain, le porte-parole du Kremlin réplique: “C’est une rhétorique très agressive et pas constructive, nous le regrettons”.
Poutine, un “tueur”
Lors d’un entretien télévisé, Joe Biden provoque la première crise diplomatique de son mandat. “Pensez-vous que (Vladimir Poutine) est un tueur ?, lui demande le journaliste.
– Oui, je le pense, répond-il, sans préciser s’il fait référence à Alexeï Navalny. “Vous verrez bientôt le prix qu’il va payer”.
Interrogé sur les ingérences électorales de Moscou en 2016 et en 2020, il répète que Vladimir Poutine “en paierait les conséquences”. “Nous avons eu une longue conversation lui et moi, je le connais assez bien, explique le dirigeant démocrate. (…) Je lui ai dit : ‘Je vous connais et vous me connaissez, si j’en viens à la conclusion que vous avez fait cela, soyez prêt pour les conséquences’”.
Plus tôt dans la journée, Washington avait annoncé étendre les restrictions d’exportation vers la Russie dans l’affaire de l’empoisonnement du principal opposant russe Alexeï Navalny, dont les services de renseignement américains attribuent la responsabilité au Kremlin.
“Celui qui le dit qui l’est”
Le lendemain, Vladimir Poutine rétorque par la moquerie : “C’est celui qui le dit qui l’est ! Ce n’est pas juste une expression enfantine, une blague (…), nous voyons toujours en l’autre nos propres caractéristiques. (…) Nous défendrons nos propres intérêts et nous travaillerons avec (les Américains) aux conditions qui nous seront avantageuses”.
Il propose alors une “discussion” diffusée en direct : “Cela serait intéressant pour le peuple russe, le peuple américain et pour beaucoup d’autres pays”. Une invitation restée lettre morte du côté américain. “C’est encore une occasion gâchée pour sortir de l’impasse des relations russo-américaines qui existe par la faute de Washington”, déplore Moscou.
>> À voir sur France 24 : Sommet Biden – Poutine : un face-à-face sous haute tension
“Le moment de la désescalade est venu”
Le 15 avril, Joe Biden adopte des sanctions contre la Russie qu’il accuse d’interférence, à la suite de la gigantesque cyberattaque de 2020. Ces sanctions, les plus dures depuis l’ère Obama, s’ajoutent à des mesures prises en mars après l’affaire Navalny.
Pourtant, au même moment, le président américain offre une main tendue : “Le moment de la désescalade est venu”, lance-t-il, proposant un sommet bilatéral “cet été en Europe”. Objectif : “Lancer un dialogue stratégique sur la stabilité”, le désarmement et la sécurité.
“Je l’espère et j’y crois”
Le 4 mai, Joe Biden répète espérer une rencontre avec le dirigeant russe. “Je l’espère et j’y crois. Nous y travaillons”. Il en fait formulé la proposition mi-avril. Vladimir Poutine avait alors laissé ses porte-parole répondre, le Kremlin assurant que des “dates concrètes” étaient à l’étude.
“Ils violent les droits”
“Je vais rencontrer le président Poutine dans deux semaines à Genève, annonce Joe Biden le 30 mai. Et je dirai clairement que nous ne resterons pas les bras croisés pendant qu’ils violent les droits (humains)”.
“Nous ne nous faisons pas d’illusions et nous n’essayons pas de donner l’impression qu’il y aura une percée, des décisions historiques amenant des changements fondamentaux”, réplique, le 1er juin, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov.
Avec AFP