Privé d’une partie de son financement, le célèbre programme européen d’échange universitaire Erasmus ne sera plus en capacité d’envoyer autant de monde que prévu en mobilité internationale à partir de 2021. Les plus précaires pourraient être les premiers impactés, alerte l’Agence Erasmus+ France, interrogée par France24.
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Erasmus sacrifié sur l’autel du plan de relance européen ? Alors que le président français, Emmanuel Macron, et ses homologues belges et allemands se félicitaient mardi 21 juillet, de la signature d’un accord européens post-coronavirus, arraché après cinq jours d’intenses négociations entre les vingt-sept chefs d’États membres, des voix se sont élevées, alertant sur les coupes prévues dans le futur budget européen.
Parmi les grands perdants du plan de relance, le programme d’échange universitaire Erasmus, qui pourrait voir son financement raboter de plus de 3 milliards d’euros.
Toutefois, le Parlement européen, qui regrette ces coupes budgétaires, a d’ores-et-déjà menacé de ne pas approuver l’accord européen, s’il n’était pas “amélioré” lors de négociations avec le Conseil. Les eurodéputés réclament des augmentations dans plusieurs domaines, dont celui de la jeunesse, qui comprend Erasmus.
En France, le célèbre programme européen est plébiscité par les étudiants chaque année. Plus d’un million de Français en ont déjà bénéficié depuis sa création [en 1987]. Ils sont les plus nombreux à en profiter devant ceux d’Allemagne, d’Espagne et d’Italie.
Tel quel, le compromis signé par les vingt-sept dirigeants européen signe-t-il l’arrêt de mort de ce symbole européen d’échange ? France 24 a interrogé Sébastien Thierry, directeur adjoint de l’Agence Erasmus + France, en charge d’analyser l’impact des projets financés par le programme Erasmus + sur les participants.
[À signaler que si le programme Erasmus proposait auparavant des échanges universitaires de six mois ou d’un an à des étudiants (uniquement) en Europe, le programme Erasmus +, quant à lui, s’étend à des publics plus variés : aux étudiants toujours, mais aussi aux lycéens, aux enseignants, aux formateurs, aux apprentis, aux demandeurs d’emploi.]
France 24 : De quelle manière le programme Erasmus + va-t-il être impacté par les coupes budgétaires annoncées par l’Union européenne ?
Sébastien Thierry : Le budget de 21,2 milliards d’euros alloué à Erasmus + pour 2021-2027 est supérieur au budget de la période 2014-2020 de 14,7 milliards. Mais il est en-deçà des 24,6 milliards d’euros annoncés par la Commission européenne en mai.
En 2020, nous finançerons 62 % des demandes de mobilités et 46 % des demandes de partenariats Erasmus +. Avec un budget inférieur à celui initialement prévu pour 2021-2027, nous craignons de devoir encore laisser une partie des candidats sur le côté.
Quels sont vos craintes concernant le futur du programme Erasmus + ? Qu’allez-vous devoir sacrifier ?
Depuis 2014, le programme Erasmus + bénéficie à un nombre croissant de personnes, notamment des publics fragiles avec moins d’opportunités. Plus nous aurons de moyens, plus l’accès à une expérience européenne et internationale encadrée et reconnue sera facilité pour tous.
Or les jeunes ayant réalisé une mobilité Erasmus + trouvent un emploi plus rapidement que les autres. Pôle emploi, les missions locales et les entreprises sont impliquées dans des projets Erasmus + pour l’insertion professionnelle des jeunes. Il est à craindre que ces publics soient les premiers touchés par un ralentissement d’Erasmus +.
Enfin, un budget Erasmus + moins ambitieux menacerait la contribution du programme à la transition écologique prévue pour 2021-2027. En effet, il est prévu qu’Erasmus + prenne désormais en charge les coûts supplémentaires liés au choix du train, plutôt que l’avion, généralement moins cher.
Les étudiants Erasmus étaient déjà inquiets en raison de l’impact de la crise sanitaire. Les programmes d’échange prévus pour l’an prochain sont-ils maintenus ?
Nous restons en lien quasi permanent avec les établissements et avons ouvert une cellule spécifique pour traiter toutes les situations des participants Erasmus + constituant des cas de force majeure liés à la crise sanitaire.
Par ailleurs, les étudiants et autres bénéficiaires Erasmus + : apprentis, demandeurs d’emploi, etc., doivent rester en contact avec le service des relations internationales de leur établissement afin d’organiser au mieux leur mobilité, en fonction des réouvertures de frontières et des conditions sanitaires dans chaque pays. Un site Internet leur donne des informations sur la situation. Enfin, nous incitons les candidats au départ à s’inscrire et à prendre des informations sur le site Génération Erasmus + pour recevoir les informations des consulats et ambassades de France.
Avec la pandémie, la Commission européenne a aussi accéléré le lancement de la mobilité hybride, [un programme] mêlant activités virtuelles et mobilité physique à l’étranger dès lors que les conditions sanitaires le permettaient.